BEAUTIFUL BABY !

Le Dr Alain Raynaud by Mj

              Il est né à partir de vendanges presque miraculées, salvatrices, les plus tardives dans l'historique des vins de Bordeaux,  après une saison sous pression, réunissant tous les excès que la Nature sait si bien nous réserver, eau donc maladies cryptogamiques, sécheresse donc blocage de maturité, nombre d'avatars ayant rendu ce millésime 2016, unique et complexe mais qui permettra des raisins ramassés particulièrement mûrs, des cabernets sauvignon et franc exceptionnels, des petits verdots à leur apogée, des merlots joufflus qui donneront un jus sombre et attesteront d'une maturité aboutie, mot-clef du millésime. Pour les dégustateurs en primeur dont je fais partie, l'exercice de déguster ce bébé en gestation s’avérera plus facile que bien des millésimes, un 2009 trop tannique, ou un 2013 flirtant avec des déséquilibres bien souvent flagrants, mais aussi agréablement éclatant que le 2015 mais avec une matière beaucoup plus fine. A l'aveugle, la dégustation du Grand Cercle qui se tient au château Montlabert à Saint Emilion,   la constance globale des vins présentés, rive droite et rive gauche, confirme la rareté du millésime et sa grandeur. Tanins fins, grain ciselé, matière souple, chair douce. 2016, royal, prouve que puissance peut s'allier à finesse. Les seuls excès à craindre seront sans aucun doute une éventuelle envolée des prix.

Alain Raynaud, à la tête du Grand Cercle mais aussi consultant au regard de plus de  40 années de vinification, sa première remonte à 1964 à Pomerol dans le vignoble La Croix de Gay à Pomerol, s'inquiète face à la qualité des vins présentés, "une flambée est à craindre. J'ai très peur que certains propriétaires recommence les mêmes erreurs. Les mêmes causes produisent les mêmes effets mais peut-on recommencer plusieurs fois les mêmes erreurs ?On doit fixer un prix de sortie propriété en fonction de son marché, il se doit d'être significatif. Chaque propriétaire se doit de connaitre son propre marché met en en garde le Dr Raynaud. "Il faut avoir une traçabilité constante des prix de la sortie et une fois sur le marché particulier. On peut reprocher un système de castes, avec ses Intouchables (les bordeaux génériques). Le négoce quant à lui reste la plus belle caisse de résonance. (Ils sont au nombre de 400 avec une soixantaine majors de la Place)
Tout cela impose une communication bien léchée, et plus encore une table ronde des bonnes manières face à l'image dégradée  de l'image de Bordeaux.   2015-2016, deux millésimes, dont le cépage mythique de Bordeaux, le cabernet-sauvignon, va signer là sa plus belle réussite, avec une aromatique rarement rencontrée, la "special touch poivrée des petits verdots détonante" et exceptionnelle (chacun sait la difficulté de la maturité tardive de ces cépages). Les raisins ont obtenu une maturité homogène, les alcools bas, contrairement au millésimes 2009 et 2010, où les degrés dépassaient les 15°et signent donc une rareté,  avec des pH autour de 3.85, conférant une acidité parfaite. Ce qui est remarquable sur ce millésime, c'est que le bois en bouche est totalement inexistant, digéré par des raisins mûrs, cette différence notable de prise de bois signe également son identité."

Vérena Castel et le Dr Alain Raynaud, à la tête du Grand Cercle : la différence poivrée du petit verdot en 2016

Le Grand Cercle est né en 2002, Rive Droite grossi de la Rive Gauche en suivant. Il regroupe 165 propriétés. "En Juin,  une proposition va être faite de réunir les 2 cercles dans un but de simplification administrative et d'alléger le coût de fonctionnement. Actuellement les subventions France Agrimer sont défaillantes, déplore Alain Raynaud, je dois moi-même anticiper des impacts financiers. Je pense désormais également à mon successeur à ce poste, il est nécessaire de renouveler les énergies, mais je dois aussi constater que l’intérêt individuel supplante l’intérêt général, peu de candidats se propose."

Marilyn
Toutes les photos m'appartiennent.