Le soleil était pourtant radieux, ce vendredi du dernier mois de l'année, de cette lumière crue et froide de l'hiver qui commence. La bâtisse, au détour d'un route sinueuse entourée de bois humides et suintants semblait sortie tout droit d'un film de Walt Disney. Et pourtant du haut de ces tours crénelées, 9 siècles vous contemplent, chargés de guerres, de croisades, de conflits locaux et d'un peuple qui se tuait au dur labeur de la vigne. Au XVI siècle, le maire de Bordeaux, Gaston de l'Isle, fit construire la forteresse sur un lieu dont Charlemagne avait marqué le territoire 8 siècles plus tôt et en définira les contours actuels.
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Château La Rivière Copyright Marilyn Johnson
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Ce jour là, le château battait pavillon rouge. James Grégoire, charentais, fabricant de remorques et de matériel agricole avait acheté le lieu, en 2002, malgré la fin tragique du propriétaire des lieux un an plus tôt à bord de son Cessna, le négociant issu de la finance, Jean Leprince. Quelques 10 millions d'Euros de travaux plus tard, James Grégoire qui avait créé des chambres d'hôtes "refusait du monde toute l'année." Son rêve de faire du lieu un hôtel va prendre forme en rencontrant un couple de chinois à la tête du groupe Brilliant basé dans la province du Yunnan, dans la ville de Pu'Er, connue depuis des millénaires pour sa civilisation du thé, jumelée depuis à la ville de Libourne, grâce à son maire Philippe Buisson, qui va se rendre plusieurs fois sur place. Lam Kok et son épouse,
Liu Xiangyun. à la tête d'une chaine d'hôtels de luxe et de spas et de plantations de thé, vont céder au charme d'une autre civilisation, celle de la vigne à Fronsac, millénaire elle aussi.
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| ©Marilyn Johnson Associated Press |
Dans la cour d'honneur, les cyprès sont enguirlandés. Tout est calme, huilé. Un groupe à l'entrée, le personnel du vignoble, se tient à distance. Plus loin, les journalistes se pressent, les élus nous attendent, sourires détendus, le projet d'envergure pour la région en mal d'équipement hôtelier haut de gamme, prend définitivement tournure. Dominique Beyli, maire de la Rivière et Philippe Buisson, maire de Libourne se réjouissent de la "concrétisation du rapprochement entre les thés de Pu'Er et l'excellence des vins de Bordeaux." Le directeur nouvellement promu, Xavier Buffo se réjouit lui aussi. Le vignoble de 65HA n'a plus rien à prouver, la qualité du vin y est régulière, James Grégoire avait investi et à la vigne et au chai. L'attachement à son ancien patron est visible mais il est séduit par le projet de Lam Kok et de sa femme. L'hôtel 5 ***** et son spa doit s'ériger en face, juste au dessus des parcelles de merlots qui entourent la propriété. Le site est magique. La Dordogne, en bas arrondit ses méandres, la vue est à couper le souffle.
Le couple des Kok nous est présentés, Lam Kok est sur la réserve quand sa femme n'est que sourire et sérénité. Flanqués de leurs interprètes, ils nous invitent à pénétrer à l'intérieur où le déjeuner des fêtes de fin d'année va être servi et nous présentent le projet. Ils l'ont voulu culturel avant tout, commercial aussi mais basé sur un échange de 2 civilisations millénaires. Les Kok sont à la tête de plantations de thés les plus qualitatifs de Chine, fermentés, cultivés biologiquement, auxquelles ils ont adjoint 10 hôtels-spas de luxe à travers leur groupe basé à Hong-Kong. Ils veulent continuer l'oeuvre entreprise par James Grégoire avec le vignoble de Château de La Rivière et entérineront une exclusivité de la vente des vins à travers Brintex, l'activité de négoce.
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Madame Kok et Philippe Buisson, maire et conseiller régional
©Marilyn Johnson AP |
La remise des clefs va se faire sur le parvis peu avant Midi. La sérénité dégagée par ces chinois tranche avec la fébrilité des journalistes. James Grégoire, heureux se félicite " C'est une transmission réussie " La pose est de mise, les sourires conquérants. Les Grégoire doivent quitter le château le soir même, ils ont jeté leur dévolu sur Royan.
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| ©Marilyn Johnson Associated Press |
La suite, vous la connaissez. On parle de malédiction. James Grégoire va décider de survoler la propriété avec son hélicoptère. A son bord, Lam Kok, son fils de 12 ans, et son conseiller financier et interprète Peng Wang. A peine décollé, l'engin va s'abimer dans la Dordogne en contrebas, non loin des bois où s'était écrasé 10 années plus tôt l'avion du précédent propriétaire.
Toutes les recherches entreprises aussitôt avec les efforts soutenus des pompiers et des plongeurs permettront de remonter le corps du petit garçon, emprisonné dans la carlingue à 7 m sous les eaux. Un témoin assurera avoir vu 2 hommes visiblement en difficulté nager mais restera impuissant sur la berge.
A l'heure actuelle, les 3 autres disparus ne sont pas encore retrouvés. Le procureur de la république de Libourne, Christophe Auger, a ouvert une enquête en flagrance pour disparition et homicide involontaire, " les causes de l'accident ne sont pas à ce stade déterminés et ne pourront pas l'être avant plusieurs semaines."
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| ©Marilyn Johnson Associated Press |
Un château de "La Rivière", dont l'histoire est donc désormais marquée par la disparition tragique de 3 des propriétaires et un héritier. Madame Kok va une fois de plus réunir 2 civilisations et leurs croyances. Une cérémonie bouddhiste de bénédiction du Château de La Rivière se tiendra la veille de Noël. Cette cérémonie se fera en présence d’une vingtaine de Maîtres Bouddhistes de la communauté Fo Guang Shan venus d’Europe, missionés par le Grand Maître Bouddhiste Xing Yun
Marilyn
Photos © Marilyn Johnson pour Associated Press
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